L'héritage de Patrick Baumann au travers de son discours inspirant au 'Summit'
Patrick Baumann est mort tragiquement durant le week-end, mais il laisse derrière lui une trace indélébile grâce à son mode de pensée novateur, son inlassable éthique de travail et son engagement de...
MIES - Patrick Baumann est mort tragiquement durant le week-end, mais il laisse derrière lui une trace indélébile grâce à son mode de pensée novateur, son inlassable éthique de travail et son engagement de tous les instants pour faire du basketball la plus grande communauté sportive du monde. Ces traits de caractère expliquent notamment pourquoi il a eu autant de succès durant ses années passées comme Secrétaire général de la FIBA.
Cette passion et cette détermination à voir son sport adoré atteindre son plein potentiel étaient évidentes lors du discours que Baumann a donné en ouverture du tout premier 'FIBA World Basketball Summit' à Xi'an, le 3 octobre en Chine.
"NOUS VOULONS QUE LE BASKETBALL DEVIENNE LA COMMUNAUTÉ SPORTIVE LA PLUS POPULAIRE AU MONDE. JE PENSE QUE NOUS SOMMES EN BONNE VOIE POUR Y ARRIVER."
Il a alors présenté les éléments clés qui mènent au succès pour les fédérations nationales, tout en soulignant l'importance pour toutes les parties prenantes du basketball de travailler ensemble, comme des membres d'une seule équipe, afin de remplir la mission de la FIBA consistant à développer le basketball.
"Nous avons une vision : nous voulons que le basketball devienne la communauté sportive la plus populaire au monde. Je pense que nous sommes en bonne voie pour y arriver, entre ici à Xi'an maintenant et les JO de Los Angeles en 2028," dit-il. "Aujourd'hui, le basketball est un sport global, il est le N° 1 des sports d'intérieur."
Pour Baumann, le moyen le plus efficace et le plus évident d'y parvenir est de commencer dans chaque pays.
"Quand vous voulez voir un sport se développer, le moteur réside dans le fait d'avoir le nom du pays écrit ici (il passe sa main sur son torse), peu importe la discipline. Le basketball ne fait pas exception," avance-t-il. "L'équipe nationale est le moteur. Bien sûr, il faut que beaucoup de choses soient en place pour qu'il y ait une équipe nationale, mais c'est ça, le moteur. Cela parle aux fans inconditionnels, mais cela parle aussi aux gens qui ne suivent peut-être d'habitude pas le basketball tous les jours. Cela permet de faire croître le nombre de personnes qui aiment le basketball et en plus elles continueront à le faire si leur équipe a du succès."
C'est pour cette raison bien précise qu'il a fourni ces années d'efforts qui ont conduit à l'adoption et à l'implémentation du nouveau système de compétition des équipes nationales FIBA, avec notamment les Éliminatoires pour la Coupe du Monde FIBA 2019 actuellement en cours.
"C'est grâce à ça que vous avez 80 pays à travers le monde, sur cinq continents, qui luttent simultanément pour essayer d'obtenir une place à la Coupe du Monde," explique-t-il. "C'est une fantastique vitrine pour le basketball, quelque chose qu'il est très difficile à réussir autrement qu'avec les équipes nationales. Comme dans le football, l'équipe nationale est la base de tout."
Même si c'est la FIBA qui a endossé le rôle de leader dans cette orientation, Baumann souligne immédiatement que les fédérations nationales ont elles aussi un rôle et des responsabilités à assumer pour que le processus soit couronné de succès pour toutes les parties impliquées.
"Alors, quel est le rôle d'une fédération nationale ?" demande-t-il rhétoriquement. "À l'évidence de protéger, de promouvoir et de pousser son équipe nationale. C'est indispensable. Si vous ne le faites pas, si nos fédérations nationales ne travaillent pas, nous n'aurons aucune chance de devenir le sport le plus populaire au monde. Bien sûr, cela ne se produit pas du jour au lendemain, cela demande beaucoup de travail. Il faut beaucoup discuter. Il faut affronter certaines craintes, surmonter des obstacles, aller au-delà de difficultés que allez rencontrer selon que vous êtes en Chine, en Suisse, au Mali, en Amérique du Sud ou encore en Papouasie-Nouvelle Guinée. C'est partout pareil.
"Pour moi, il y a 10 facteurs qui mènent au succès. Tout d'abord, si vous ne faites pas les choses avec un peu de passion et d'engagement, cela ne marchera pas. Vous avez besoin d'énergie, de motivation (#1). Vous devez vous réveiller en vous disant : je veux joeur au basketball, je veux que cela devienne le sport le plus populaire, je veux en être un des leaders. Peu importe les problèmes, c'est ce ballon qui compte le plus. Je veux jouer avec, dribbler à travers le terrain et aller marquer.
"L'énergie et la motivation sont indispensables, mais elles ne suffisent pas. Il faut aussi avoir une stratégie et l'éxecuter (#2). Quand vous préparez un match, vous voulez suivre un plan de match. C'est la même chose pour être un leader au sein d'une fédération nationale. Trop souvent, les choses ne sont la conséquence que de choix personnels et politiques. Mais ce qui compte, c'est de voir plus loin que seuls certains mandats."
Baumann poursuit en indiquant que le travail d'une fédération nationale ne commence pas ni ne s'achève avec ce qu'il se passe au sein de celle-ci uniquement. Il faut entretenir des bons rapports avec les différents partenaires et parties prenantes.
"Vous êtes motivés, vous avez une stratégie, vous voulez l'appliquer. Et ensuite vous remarquez qu'il y a plein d'autres acteurs du basketball autour de vous, chacun d'entre eux avec une stratégie, des idées et des objectifs différents," note-t-il. "Cela devient tout d'un coup votre plus grand challenge : comment les convaincre que votre stratégie est la bonne ? Mais c'est capital. Il s'agit alors de respecter toutes les parties impliquées (#3), de les intégrer. Il faut les accueillir dans votre 'maison'. Et c'est ça le plus délicat. En même temps que le sport se développe, leurs intérêts vont grandir et il se peut que ceux-ci ne soient plus les mêmes que les vôtres. Il est donc primordial de trouver des compromis."
"Il faut impérativement d'abord protéger les joueurs," insiste Baumann. "Mais il faut aussi penser aux clubs, aux ligues, qui veulent également se développer, mais qui ont peut-être une vision à plus court terme que vous, la fédération, qui voulez mettre en place un plan sur 10 ou 20 ans, avec un titre de champion olympique en ligne de mire et la volonté de faire du basketball le sport le plus populaire de votre pays."
Un autre élément clé est le fait, pour les fédérations nationales, de recevoir le soutien du gouvernement et du Comité national olympique (#4).
"L'ÉQUIPE NATIONALE EST LE MOTEUR. CELA PARLE AUX FANS INCONDITIONNELS, MAIS CELA PARLE AUSSI AUX GENS QUI NE SUIVENT PEUT-ÊTRE D'HABITUDE PAS LE BASKETBALL TOUS LES JOURS."
Avec tous les enjeux du moment, il est facile de manquer de perspectives. Baumann avertit sagement qu'il ne faut pas remettre le futur à plus tard.
"Il n'y a rien de plus important que d'investir dans la jeunesse et dans les coaches (#5). Parfois, l'absence de coaches qualifiés est un grand handicap pour de nombreux pays," reconnaît-il. "Les coaches, ils ne sont pas juste là pour enseigner la technique. Certes, il faut qu'ils soient compétents techniquement, mais il faut qu'ils sachent transmettre la passion pour le basketball. C'est comme ça que vous pouvez façonner vos nouveaux joueurs, vos futurs talents qui un jour seront champions NBA, champions avec leurs équipes nationales ou champions locaux. C'est la clé - investir dans la formation des coaches et des jeunes. Nous devons préparer la prochaine génération, pas seulement sur le terrain, mais à ses abords aussi."
"Un autre élément important qui permet à une fédération nationale d'avoir du succès, c'est d'aller voir ce qu'il se fait ailleurs (#6). Il n'y a pas de solution toute donnée, mais si vous allez à la rencontre des autres, comme par exemple ici, vous pouvez apprendre d'eux, profiter de leur expérience et essayer d'appliquer leurs pratiques aux besoins de votre propre pays."
Il souligne également la valeur de la recherche de stabilité (#7) et de l'exploitation des outils digitaux (#8) pour réunir encore plus de fans autour du basketball.
Baumann esstime qu'il faut toujours se concentrer sur l'essentiel et sur le sport en lui-même.
"Le sport doit toujours passer en premier (#9). Une ligue peut avoir des intérêts financiers, certes, mais en tant que fédération, vous devrez peut-être lui rappeler qu'il faut réinvestir dans le sport," met-il en garde. "Et si des gens dans notre famille utilisent le basketball pour faire de l'argent, ce n'est pas un problème en soi si vous arrivez à vous entendre pour qu'ils investissent dans le développement de notre sport, que ce soit à l'échelle mondiale ou nationale."
Baumann dit qu'il faut être ouvert au changement plutôt que d'en avoir peur, prenant la FIBA en exemple pour illustrer ses propos.
"Nous devons changer. Nous devons continuer à évoluer (#10). La structure que la FIBA avait depuis 1932 n'allait pas fonctionner jusqu'à 2028. Il fallait faire des ajustements, l'adapter au monde moderne," dit-il. "Pour y parvenir, il faut également que les fédérations nationales se penchent sur la question. Réinventez-vous, trouvez des nouvelles manières de vous organiser. Intégrez tous vos partenaires. Créez de nouvelles disciplines comme nous l'avons fait avec les 3x3, même s'il faut pour cela 'secouer le cocotier' et interpeller les croyances des gens. Il est important de continuer à évoluer car si nous ne le faisons pas, d'autres le feront à notre place et nous n'atteindrons pas notre objectif de devenir le sport N° 1 dans le monde."
Adam Silver, Commissaire de la NBA, Yao Ming, Président de la Chinese Basketball Association (CBA) et Patrick Baumann, Secrétaire général de la FIBA, avec le 'FIBA Basketball World Cup trophy'
Se projetant vers 2019 et la toute première Coupe du Monde FIBA à 32 équipes, Baumann explique pourquoi il ne voit pas cela comme un point culminant, mais plutôt comme une étape vers quelque chose de beaucoup plus grand.
"Nous avons une Coupe du Monde qui arrive l'an prochain, mais ce n'est pas la ligne d'arrivée, l'atteinte de notre objectif. C'est juste une étape et c'est comme ça que nous voulons que la Chine appréhende cet événement, comme une étape vers quelque chose de plus grand," indique-t-il.
L'ambition de Baumann pour que le basketball exploite son plein potentiel ne s'est pas limitée ou ne s'est pas concentrée uniquement sur le pratique par les hommes et à 5x5.
"Cela implique le basketball féminin, le basketball jeunesse et le 3x3," remarque-t-il. "Le 3x3 n'est pas un membre étrange de la famille. C'est désormais notre seconde discipline et elle figure au programme olympique. Tous les continents étaient représentés en quarts de finale de la Coupe du Monde féminine FIBA, ce qui signifie que le basketball féminin a une portée véritablement globale. Comme pour tous les sports, il faut du temps pour créer une génération talentueuse, des structures et réussir à bien s'organiser."
Enfin, en revenant sur le thème principal du 'Summit' - Construire ensemble le futur du basketball - Baumann a demandé à tous les acteurs du basketball de s'impliquer, de s'engager et de participer au développement du basketball.
"Cela me tient vraiment à cœur. Nous sommes et serons toujours un sport d'équipe. Le mot équipe signifie que pour y arriver, nous devrons travailler tous ensemble."
FIBA